Patrimoine, tourisme et territoire: changer de regard

Je profite d’un moment de tranquillité pour vous annoncer ma participation aux Quinzièmes Rencontres internationales des chercheurs de la relève en patrimoine, qui auront lieu en Crète à la Canée. 

Cette année le thème est «Patrimoine, tourisme, territoire: changer de regard» et sont accueillies à l’École d’architecture de l’Université technique de Crète, en collaboration avec l’EIREST, l’Équipe interdisciplinaire de recherches sur le tourisme.

Cette édition des Rencontres est l’œuvre d’Allison Strickland, Katerina Karadima, Xinyu Li, Juliette Passilly et Flore Vigné; les propositions qu’elles accueillent considèrent 16 pays sur cinq continents, observés par des chercheuses et des chercheurs de toute la planète.

J’interviendrai le vendredi 26 avril, pour la session Communautés locales de 15h30 à 17h, sous la présidence de Luc Noppen.

« Professeur d’histoire de l’architecture et d’urbanisme, Luc NOPPEN s’implique dans plusieurs communautés patrimoniales. Il préside cette session qui aborde comment les communautés locales se saisissent des modalités du patrimoine et se les approprient au profit du développement de leur territoire. La patrimonialisation des cheferies traditionnelles présentée par Avenir Géraldine MEIKENGANG permet d’impulser le développement de certaines zones rurales camerounaises en dialogue avec les acteurs et les occupants. Élodie RIVIÈRE, par le biais de l’exemple du château du Gers, explique comment le patrimoine des châteaux français est localement mobilisé pour le développement d’attractivité et d’activités au profit des habitants des territoires ruraux. Mira DAVID pour sa part présente les nomades du village Merzouga qui ont intégré les activités touristiques à leur quotidien de vie, impulsant l’économie locale. »

Mon sujet sera le suivant : Appropriation patrimoniale et intégration de la jeunesse en zone rurale : le cas du château de Lavardens (Gers, France)

 

Notre terrain d’étude se situe dans le Gers, un département français où le tourisme participe à consolider l’économie au sein d’une campagne qui prédomine. L’offre et la richesse touristique se structure essentiellement autour du patrimoine bâti. Ces dernières années, la politique culturelle déployée dans les espaces ruraux — et en particulier dans les monuments historiques —, a été le sujet de nos recherches. La patrimonialisation figure comme une notion majeure à analyser car elle en cours de construction. Cette dernière implique un processus dynamique qui met en lumière les jeux d’acteurs, les mobilisations sociales autour de la signification du patrimoine, de son réinvestissement, de son appropriation, les convergences et éventuellement les conflits entre les groupes sociaux.

Afin d’étudier la patrimonialisation, nous nous sommes appuyés sur les données recueillies au château de Lavardens, un site sauvé de la ruine dans les années 1970 et transformé en un centre d’art. Depuis 2020, ce château a accueilli plus de 100 000 visiteurs et cette hausse de fréquentation est due en partie au modèle de gestion participatif mis en place par l’association gestionnaire et l’équipe de travail (composées en majorité de jeunes gens âgés de 20 à 30 ans). Le monument souhaite devenir une vitrine de la culture gersoise, tout en dynamisant le tourisme et l’économie. En parallèle, l’association gestionnaire organise des expositions temporaires et artistiques mettant à l’honneur des artistes français et/ou étrangers ; et elle mène plusieurs travaux de restauration du bâti. Depuis quatre ans, l’insertion socioprofessionnelle figure comme une des préoccupations principales.

L’enjeu est de créer une collaboration entre les mondes culturel, professionnel et universitaire, d’intégrer différents corps de métiers autour d’un même projet et d’assurer la longévité d’un monument historique tout en y apportant une dimension sociale. La mise en tourisme de certains sites gersois a été en partie réussie grâce à l’appropriation patrimoniale par la jeunesse ; cette appropriation est intervenue à la suite de l’embauche d’alternants de niveau master affiliés à l’Université de Pau. Nous notons l’amélioration d’une offre plus qualitative et donc des retours très positifs des visiteurs et des touristes. La jeunesse intervient à différents moments de la patrimonialisation : elle peut être à la fois actrice, promotrice et réceptrice de l’offre culturelle. Au château de Lavardens c’est un constat perceptible tant dans la gestion du monument que dans les projets de développement et de médiation : les étudiants recrutés ont su s’intégrer en faisant évoluer leurs fonctions et en établissant une répartition équilibrée de leurs missions. Il nous paraît important de faire place à la jeunesse dès les premières transformations d’un site culturel afin d’espérer une patrimonialisation harmonieuse et équilibrée entre les acteurs et les différentes communautés patrimoniales. Encore faut-il trouver et développer les arguments adéquats pour attirer cette jeunesse en zone rurale, ce qui se révèle complexe, mais pas impossible.

Ainsi, cette communication se propose d’aborder ces arguments pour « changer de regard » sur l’attractivité du patrimoine en zone rurale, et de les partager lors des Quinzièmes Rencontres internationales des chercheurs de la relève en patrimoine.

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